Le SNES-FSU vous propose une trame de courrier, à adapter à votre collège, pour vous adresser aux parents d’élèves et leur expliquer les raisons de la nouvelle grève du 6 février.
Madame, Monsieur,
Les personnels du collège tiennent à vous expliquer les raisons qui les poussent à rester mobilisé.es tout au long de la semaine, notamment en étant en grève ce mardi 6 février.
Cette nouvelle journée de grève, cinq jours après celle du 1er février, est à notre sens indispensable pour que soit abandonné le projet de réforme du collège voulu par G. Attal, alors ministre de l’Éducation nationale, et poursuivi par la nouvelle ministre.
Ce projet consiste notamment, dès septembre prochain, à mettre en place en Sixième et Cinquième des groupes de niveau sur la totalité des horaires de mathématiques et de français. Les élèves n’apprendraient donc plus ensemble dans la même classe, mais seraient mélangé·es à des élèves d’autres classes, pour être réparti·es en groupes selon leur niveau supposé. Seuls les groupes des élèves ayant obtenu les résultats les plus faibles aux évaluations nationales auraient un effectif allégé. En théorie, les élèves, selon leur évolution au cours de l’année, pourraient changer de groupe et donc de professeur·e ; en pratique, ce sera exceptionnel. En effet, cette organisation a été testée de nombreuses fois, en France comme à l’étranger, et toutes les études ont montré qu’elle participait à creuser les écarts entre les élèves : les élèves les plus fragiles, réuni·es ensemble, progressent peu et le risque de décrochage est plus fort ; les élèves placé·es dans le groupe qui avance plus vite dans le programme, n’arrivent pas tous et toutes à supporter la pression, voire la compétition, et la vitesse du rythme d’apprentissage… Ce serait créer un collège à deux vitesses, avec une probable augmentation du taux d’échec au brevet, alors même que la réforme prévoit de ne pas laisser les élèves n’ayant pas eu leur brevet accéder à la Seconde (professionnelle, générale et technologique) dans laquelle ils et elles auront été accepté·es. Toute la recherche universitaire atteste que nous aiderions moins bien nos élèves avec ce système de séparation et nous savons aussi que beaucoup vivraient très mal cette situation.
Par ailleurs, la mise en œuvre de ces groupes de niveau exige des moyens dont ne dispose pas le collège. Donc pour financer les groupes de niveau, on supprimerait dès la rentrée prochaine ou à la rentrée suivante une heure de cours hebdomadaire en Sixième, les dispositifs d’accompagnement personnalisé dont bénéficient la totalité des élèves actuellement, des options de langues (latin, classe bilangue…), les quelques dédoublements qui existent encore, des langues vivantes, la chorale… Les choix du gouvernement vont donc conduire à une dégradation des conditions dans lesquelles vont étudier vos enfants dans bon nombre de disciplines
Cette organisation en groupes de niveau occasionnerait en outre des difficultés insurmontables pour construire des emplois du temps corrects pour les élèves car les cours de mathématiques et de français devraient avoir lieu sur les mêmes créneaux horaires pour répartir les élèves de plusieurs classes selon leur niveau respectif ; la conception des emplois du temps deviendrait même quasi impossible avec la généralisation des groupes de niveau en Quatrième et Troisième prévue pour la rentrée 2025. Et nous savons d’ores et déjà que les enseignant·es de mathématiques et de français du collège ne seront pas assez nombreuses et nombreux pour intervenir simultanément dans les groupes. Il y a aura donc des groupes sans professeur·es à la rentrée, vous êtes bien placé·es pour savoir les effets désastreux du manque de professeur·es, cela va donc continuer et même s’aggraver.
Au-delà de cette organisation et du possible chaos à la rentrée de septembre, qui risque au passage de désorganiser encore un peu plus les vies scolaires, les personnels du collège refusent de participer au tri de leurs élèves selon leurs compétences supposées. En outre, qui pourrait accepter une inscription systématique des élèves en situation de handicap ou à besoins éducatifs particuliers dans le groupe des élèves « les plus faibles » ? Aucun aménagement n’est pourtant prévu pour l’éviter ! Nous savons que les jeunes apprennent mieux ensemble, au sein de leur classe. La coopération, l’échange, la reformulation entre les élèves sont des atouts qui profitent à toutes et tous. Dans des classes avec des effectifs moins lourds, l’hétérogénéité est une richesse : c’est bien des moyens pour réduire les effectifs dans la classe qui sont attendus par les personnels pour faire réussir tous les élèves ! Et non une politique du tri, pour identifier et séparer celles et ceux qui ne peuvent pas suivre dans des classes de plus en plus chargées des programmes toujours lourds avec des enseignant·es rendu·es moins disponibles.
Madame, Monsieur, quand d’autres familles préfèrent le repli sur soi que promeut l’école privée, vous avez fait le choix de l’école publique et laïque pour la scolarité de votre enfant, nous vous en sommes reconnaissant·es. Nous espérons vivement que vous comprenez pourquoi nous serons en grève –c’est une journée entière de salaire retirée– et que vous nous soutenez pour défendre un collège égalitaire pour vos enfants et un parcours sans obstacle vers le lycée professionnel, général ou technologique.