En quelques semaines, nous avons connu toute une série de déclinaisons de ce qui doit constituer le projet d’évaluation, mais aucune réponse n’est réellement apportée aux problèmes posés par la mise en œuvre du contrôle continu. Le ministère peut certes afficher des objectifs, mais dans les faits rien ne permet, comme il l’écrit, de garantir « la valeur du diplôme », l’égalité de traitement, ou même de « participer au dialogue avec les familles ». Pour des précisions sur la gestion de la fraude et des absences, de la prise en compte des élèves en situation de handicap, il renvoie à plus tard. Par contre, il n’hésite pas à multiplier les prescriptions pour assurer le cadrage étroit des pratiques enseignantes sous la tutelle du chef d’établissement.

 

On retrouve dans l’article ci-dessus les dernières références réglementaires et le détail de l’architecture du baccalauréat. Il y a encore des textes à venir puisque le ministère continue son travail de colmatage d’un échafaudage toujours plus brinquebalant.

Le projet d’évaluation, un objet de management bien identifié

Au lieu de clarifier les choses, la FAQ ministérielle cherche à étendre le projet d’évaluation bien au-delà du périmètre fixé réglementairement, notamment en y incluant des matières évaluées en épreuves nationales. Elle voit dans un seuil minimum du nombre d’évaluations et l’interdiction du 0 pour travail non fait, des éléments de nature à assurer l’harmonisation des pratiques. Cela suppose de distinguer les notes qui comptent des autres et d’ailleurs, le ministère veut obliger à en afficher le détail dans l’éditeur de note. Il appelle à justifier du statut de chaque note auprès des familles. Les jalons d’un contrôle permanent de l’acte d’évaluation sont ainsi posés.

La moyenne de contrôle continu « significative » n’existe pas

La validité d’une note de bac ne dépendrait donc que de la forme ? Sur quels critères décidera-t-on qu’un élève dispose d’une note « significative » ou pas ? Faute d’un nombre suffisant d’évaluations dans l’année, il y aurait donc l’organisation d’une épreuve ponctuelle, tout aussi locale, mais dont la note unique remplacerait toutes les autres. Les projets de décret et d’arrêté qui viendront une fois de plus modifier l’architecture du baccalauréat sont pourtant clairs : seuls l’absence de moyenne de contrôle continu peut justifier de l’organisation de l’épreuve ponctuelle de remplacement. Hors de cette disposition qui a vocation à être exceptionnelle aux dires même du ministère, rien ne contraint réglementairement à l’organisation de devoirs de rattrapage en cas d’absence, qu’elle soit justifiée ou non. On voit ici comment l’accumulation de prescriptions finit par occulter la règle officielle pour mieux contraindre les pratiques pédagogiques et donner l’illusion de l’objectivité.

Pourquoi cette insistance sur la « robustesse » de la note de contrôle continu ? En vérité, aucune note de contrôle continu ne peut garantir une égalité de traitement puisque son principe même consiste à tenir compte des situations particulières. Aucune n’est donc « significative » en soi. Le projet d’évaluation serait une « démarche qualité » comme aiment à le définir ses promoteurs et s’inscrit ainsi davantage dans une logique de marketing. Avec la disparition des épreuves cadrées nationalement, il faut rétablir la confiance perdue entre le lycée prestataire et un usager traité ici comme un consommateur, le tout dans un système éducatif où les établissements sont mis en concurrence. Peu importe que l’égalité de traitement ait totalement disparu , il faut juste en donner le « sentiment ». Le projet d’évaluation fonctionne ainsi comme un leurre.

Ce protocole bureaucratique de validation de la note procède en fait d’un processus de déstabilisation des métiers de l’éducation, et tout particulièrement du métier enseignant ici dépossédé de son expertise professionnelle en matière d’évaluation des apprentissages.